QUAND LE CINEMA DECOLONISE L’AIDE AU DEVELOPPEMENT

Presentation de Jean-Pierre Bekolo du 12 décembre 2024 à l’ACADEMY OF INTERNATIONAL AFFAIRS NRW à Bonn en Allemagne

L’aide au développement en Afrique, telle qu’elle est pratiquée par les pays occidentaux, se révèle être une entreprise dépourvue des germes nécessaires à la véritable transformation du continent. Il devient impératif de repenser cette approche, en mettant au centre de la réflexion le concept fondamental de transformation, essentiel à l’évolution africaine. Ce processus de réévaluation nécessite une analyse critique de plusieurs constats et éléments caractéristiques du modèle actuel.

Le premier constat met en lumière la réalité selon laquelle la colonisation a eu un impact plus significatif sur la transformation de l’Afrique que l’aide au développement actuelle. Ce fait, bien que souvent négligé, révèle une vérité profonde : l’Afrique a été davantage façonnée par des forces historiques complexes que par les efforts contemporains d’assistance.

Un deuxième constat met en évidence une réalité dérangeante : l’aide au développement fonctionne plus comme un programme de déculpabilisation de l’Occident que comme un véritable moteur de transformation. La nécessité de se libérer de ce modèle culpabilisant devient évidente pour engager un véritable processus de développement.

Le refus de partager la technologie et la science avec l’Afrique post-coloniale constitue un troisième constat inquiétant. Ce rejet peut être interprété comme une manifestation de racisme technologique, insinuant une supériorité occidentale face à la technologie et aux connaissances. Des questions essentielles émergent, telles que celle de l’absence d’une Sorbonne à Dakar quand on la retrouve à Dubai, soulignant ainsi la nécessité de repenser les dynamiques de partage des connaissances.

Enfin, le quatrième constat pointe du doigt une réalité souvent négligée : l’Afrique est encore malade de sa rencontre avec le blanc, comme l’a souligné brillamment Frantz Fanon. Les séquelles psychologiques de cette rencontre demeurent des obstacles majeurs à la transformation véritable.

Pour transcender ces constats, il est nécessaire de repenser fondamentalement le modèle actuel d’aide au développement. En envisageant une approche qui favorise la transformation, il devient crucial d’adopter des modèles alternatifs. Parmi ceux-ci, le cinéma se distingue comme un outil potentiellement puissant.

Le cinéma, défini comme un double mouvement (kine), peut être envisagé comme un instrument de transformation sociale. À travers le « Healing Cinema », le cinéma peut non seulement révéler des perspectives alternatives mais aussi stimuler un dialogue critique. Imaginons un cinéma qui va au-delà du divertissement, un cinéma qui inspire le mouvement, qui incite à reconsidérer l’accident colonial sous une nouvelle lumière.

En conclusion, la décolonisation de l’aide au développement en Afrique nécessite un changement profond de paradigme. Loin des modèles instructifs, sacerdotaux, et culpabilisants, la transformation réelle émergera d’approches constructives, thérapeutiques, et dialogiques. Le cinéma, en tant qu’outil de réflexion et de mouvement, peut jouer un rôle central dans cette entreprise. Il est temps d’embrasser une vision qui redéfinit l’aide au développement comme un catalyseur de la véritable transformation africaine.

Mon livre CINEMA AS A TRANSFORMATIVE TOOL FOR THE THERAPEUTIC INTELLECTUAL est disponible ici.

Laisser un commentaire